Malgré tout le mal que l’on puisse penser de Pinochet, les chiliens lui reconnaissent la capacité d’avoir instauré une économie stable qui n’a pas souffert des problèmes de ses pays voisins et qui apparaît aujourd’hui comme la plus solide du continent sud-américain.
Certes les réformes libérales du début de la dictature (privatisations, modernisation du marché des capitaux, réforme de la législation du travail…) et la crise bancaire de 1982- qui a entraîné la refonte complète du système financier du pays- ont été douloureuses.
Mais le pays a connu une performance remarquable depuis ; sur les 25 dernières années, la croissance annuelle de l’économie a été de 5,2% ! Le PIB par habitant est à parité de pouvoir d’achat quelque chose proche de 15 000$ par an (soit facilement le double des pays limitrophes).
En 2004, le rebond de l’économie s’est affirmé : la croissance a été de 6,2% tirée par la hausse des exportations (+50%) et de la production industrielle (+7,6%). L’excédent commercial s’est inscrit à plus de 9 milliards de dollars. Le pays connaît une inflation faible (2,5% cette année là) et profite d’un Etat dont la dette est fiable (un endettement public inférieur à 50% du PIB), qui dégage dorénavant des excédents budgétaires (2,2% du PIB). Cela a pu permettre d’abaisser les taux d’intérêts quand cela s’avérait nécessaire (de 6% vers 2001 à 2,5% aujourd’hui) et relancer l’économie. Pour 2005, le soleil n’a pas tourné ; on estime la croissance à près de 6%- les mêmes causes entraînant les mêmes conséquences- tirée par la demande asiatique et la hausse des matières premières.
L’économie chilienne a plusieurs caractéristiques :
Premièrement c’est une économie libérale très ouverte sur l’étranger. Les exportations représentent ainsi 30% du PIB. Le Chili est donc asujetti aux aléas de la production industrielle mondiale. Notons que la Chine représente 30% des exportations minières du pays.
Deuxièmement, elle est principalement fondée sur la production de matière première. L’activité minière ne représente que 10% du PIB mais 55% des exportations. Le pays est le premier producteur mondial de cuivre (36% de la production mondiale) et qui représente l’essentiel de ses exportations minières mais aussi de nitrates (100% de la production mondiale), de lithium (45%), d’Iode (60%) et un producteur important d’argent et d’or.
80% des mines sont à ciel ouverts, ce qui offre un avantage en termes de coûts alors que ses réserves de matières premières sont encore peu entamées. Notons aussi que malgré la présence de grandes multinationales minières (BHP, Falconbridge..) le secteur est dominé par une entreprise publique, la Codelco qui représente le sixième du cuivre produit dans le monde. L’autre particularité de ce secteur est que le budget de l’armée est directement dépendant des recettes du cuivre exporté (10% exactement) et donc que le moral est au beau fixe dans les troupes ; on n’envisage pas de coup d’Etat dans un prochain futur !
Troisièmement, l’économie chilienne laisse une place importante à l’agriculture et à la transformation agro-alimentaire. Ces deux secteurs représentent près du quart de l’économie du pays. Cette « industrie » bénéficie d’une main d’œuvre pas chère, de l’absence de maladies et de parasites, du décalage d’hémisphère et de la diversité des climats. Le Chili est devenu le premier exportateur de fruits frais de l’Hémisphère sud (raisins, pommes, kiwis…à direction majoritairement de l’UE et des USA), est un gros producteur d’orge et de betterave et devient un acteur important dans l’élevage (déjà 4,5 millions de têtes de bovins dont la particularité est d’être exempts de fièvre aphteuse). Les exportations de vins profitent d’un état phyto-sanitaire exceptionnel de son vignoble (exempt de Phylloxéra) et de la montée en gamme de sa production. Le secteur halieutique est en plein développement ; profitant d’une grande superficie de pêche et développant l’élevage, le pays est devenu le deuxième exportateur mondial de saumon. Enfin, il faudrait encore rajouter l’industrie du bois qui représente 3,5% du PIB. Bénéficiant d’une grande forêt (Pins, Eucalyptus), le Chili a construit une industrie du cellulose compétitive et maintenant du meuble.
Pour aller, plus loin…
Voici donc les principaux moteurs de l’économie chilienne ; ce qui n’empêche pas de jeter un coup d’œil aux autres :
L’automobile équipe un individu sur 7, mais la taille du pays en fait un marché réduit et uniquement d’importations. La concurrence est vive (40 marques) et les ventes sont concentrées sur des petits modèles ou quelques 4*4 car l’imposition est élevée dès que l’on dépasse un prix d’achat de 19000$. GM, Toyota et Nissan dominent même si les entreprises françaises résistent.
Les cosmétiques ; de 14$ par habitants en 1990, la dépense est montée à 40$ dix ans après. Le marché se segmente de plus en plus et les goûts sont proches de ceux des européennes. Les ventes se font à travers les pharmacies ou les espaces beauté de grands magasins. Les grandes marques sont présentes mais on note le poids non négligeable de marques locales (ie Pamela Grant).
L’eau ; le taux de couverture de traitement des eaux usées est le plus élevé du continent, soit 68%. Plus encore, 100% de la population a accès à l’eau potable, gérée par des entreprises concessionnaires étrangères. Près du tiers du marché revient à Suez.
Gaz naturel : c’est la deuxième source d’énergie du pays (le quart de la demande énergétique) et est géré majoritairement par une entreprise publique. On note une forte demande de la part de la chimie et notamment d’une très grande usine de Méthanol au sud du pays.
La santé : la pays a un système de santé moderne mais qui favorise le secteur privé et les plus riches. Ainsi les médicaments ne sont pas remboursés (la moitié sont génériques) et les hôpitaux publics sont connus pour leur déficience. Cela pourrait changer progressivement si l’on en croit les projets politiques de Mme Bachelet, le nouveau président. On note des marchés concentrés : la distribution aux mains de 3 chaînes de pharmacie, les médicaments de grands groupes américains et l’assurance autour d’un système de fonds de pension géré par des étrangers.
L’électricité : près de la moitié de la capacité installée l’est en hydroélectricité (le reste en thermique) ; ce qui représente un coût avantageux mais des risques en cas de sécheresse. Suez, Endesa et AES dominent la production.
La distribution : la distribution organisée représente 50% des ventes et est monopolisée par 3 grandes chaînes locales d’hypermarché (Lider, Jumbo) qui ont racheté les emplacements de leurs concurrents occidentaux. Reste un autre phénomène unique au Chili : les grands magasins (Falabella, Ripley et Paris) qui se sont développés rapidement profitant de l’essor de leur activité financière qui représente les ¾ de leur profit. Le succès de ce format repose sur la création d’une activité de crédit interne au groupe et non assujettie aux règles prudentielles du secteur bancaire.
La téléphonie fixe est dominée par deux entreprises ; CTC dans les appels locaux et Entel dans le longue distance. Le secteur bien que dégroupé et ouvert à la concurrence depuis dix ans, en situation de quasi-monopole.
Bonjour,
Toujours très intéressant vos propos que je suis régulièrement. on aurait aimé une petite transition entre la Chine et le Chili...
1ère question :
Pourquoi le chili est-il épargné par le Phylloxéra ?
2ème question
Pourquoi la viticulture en Argentine est-elle moins développée alors que le climat est comparable à celui du chili ?
Merci pour vos aventures
Rédigé par : Huangpo | lundi 04 septembre 2006 à 21:41