Préambule :
Pour l’anecdote, tout le monde se raconte l’histoire d’un australien qui cherchait un appartement à Shanghai, il y a deux ans. Lorsqu’il commence, l’appartement recherché valait 120 000$. Un an après, lorsqu’il signe définitivement l’achat, ce même appartement vaut 300 000$. Autant dire que les prix de l’immobiliers en Chine fluctuent rapidement.
Introduction :
Globalement, je ne peux pas apporter de réponse à cette question. Lors de mon voyage précédent en Chine, j’observais à Shanghai un grand nombre de bâtiments neufs sans la moindre lumière la nuit. 3 ans, après ces bâtiments semblent occupés mais les nouvelles constructions sont encore plus nombreuses et le phénomène de vacances des logements neufs semble s’être reporté sur la périphérie de la ville.
Quelques chiffres sur l’immobilier en Chine :
Les investissements dans la construction étaient de 16 milliards de $ en 1990. Dès 2000, ils étaient de plus de 100 milliards par an. Les surfaces commencées étaient de 140 millions de mètre carré en 1997 et dépassaient 600 millions en 2004, dont les 4 cinquièmes dans le résidentiel. D’aucun dise qu’il se construit en Chine chaque année deux Manhanttan. Depuis la réforme du secteur en 1998- qui a permis aux chinois de devenir propriétaire de leurs logements appartenant auparavant à leur unité de travail-, la croissance de l’immobilier a été de 20%/an. Le rythme effréné de construction ne touche pas seulement les régions côtières mais englobe toute les villes d’importance du pays. Faire des chiffres en ce domaine est un exercice périlleux mais Pékin prévoit encore la création (ou le besoin) de 70 millions de logement sur les dix prochaines années, soit près de 6 milliards de m2.
En 2003 l’investissement immobilier avait représenté 900 milliards de RMB (soit le quart de l’investissement national et une hausse de 32% !). Cette même année, les prix ont cru en moyenne de 20%. Dès lors, le gouvernement a mis en place les premières mesures anti-surchauffe. En 2004, près de 600 millions de mètres carré ont démarré en milieu urbain (soit une hausse de 10%), mais seuls 425 millions ont été achevés et 382 millions vendus. Mais les prix n’ont cru que de 14%, ce qui paraît encore étonnant lorsque l’on soustrait le nombre d’appartement vacants et que l’on sait que simultanément les loyers ont baissé. Certains expliquent l’inflation des prix du fait que l’immobilier a été jusqu’à récemment le seul placement financier disponible pour les ménages chinois et remarque aussi la hausse des coûts de construction et des matières premières. Ceci est sujet à caution : notons ainsi que si les coûts de la construction représente les 3 quarts du prix total d’un logement neuf dans le monde, ceux ci ne représentent qu’un peu plus de la moitié du prix réel en Chine. Le reste correspond principalement à la marge du promoteur. Il y a donc bien spéculation immobilière.
L’Etat tente de limiter la spéculation immobilière en prenant un certain nombre de mesures coercitives : la mise en place d’un impôt sur les plus-values lors de la vente d’un bien immobilier dans les deux ans après l’achat, l’interdiction de vendre avant l’achèvement des travaux, ou encore l’obligation de rembourser ses emprunts avant la revente. Les autorités esquissent aussi un premier impôt sur la propriété qui devrait concerner dans un premier temps les propriétaires dans les 6 premières villes chinoises avant d’être étendu à l’ensemble du pays. Elles devraient bientôt instaurer des pénalités fiscales concernant les propriétaires de terrains non exploités dans l’année qui suit l’achat. Par l’intermédiaire de la banque centrale, les taux d’emprunts proposés aux ménages ont été relevés et plus particulièrement lors de l’achat d’un second bien.
Ces mesures ont semble-t’il eu de l’effets. A Shanghai même, si les prix ont continué de grimper en début d’année 2005, il y a eu un coup d’arrêt fort durant l’été. Sur l’ensemble de l’année, les prix auraient reculé en moyenne de 32%. Par exemple dans le quartier de Xianfeng (à 40 min du centre), un appartement de 100 m2 qui se vendait un an plus tôt 62000$, valait fin décembre 33% de moins. Pire encore : dans le quartier de Pudong (le plus cher du pays) sur la même période, les prix sont passés de 18000 Yuan le mètre carré à moins de 10 000. Cependant la baisse des prix n’a concerné que quelques rares villes. Elle montre cependant la volonté marquée des autorités de limiter la spéculation immobilière.
Le risque majeur d’une baisse immobilière : une baisse de la valeur des actifs entraînerait un surendettement des ménages ! Les crédits immobiliers douteux représentaient 1,5 MM de Yuan en 2005 contre 560 millions en 2004. Mais si le mouvement de baisse s’étend à d’autres villes du pays, les créances douteuses pourraient encore croître. Ainsi nous noterons que l’ensemble des prêts immobiliers correspondent à 300 milliards de Yuan, soit 17% du PIB.
Si la surface par personne n’était que de 5 m2 dans les années 80, elle est déjà de 20 m2 aujourd’hui. Le taux de propriété a plus que doublé en 5 ans et serait aujourd’hui de 70%, alors que dans un pays riche comme les USA il n’est que de 65%. Reste qu’il faut relativiser ce qu’est la propriété en Chine : le terrain appartient à l’Etat ou aux collectivités, mais l’individu a le droit d’utilisation du sol, soit alloué ou concédé pour une période de 30 ans (baux commerciaux) ou de 70 ans (baux résidentiels).
Les promoteurs immobiliers (Soho China, Vanke…) sont concentrés dans les grandes villes et ont des relations personnelles fortes avec les gouvernements municipaux qui jouent beaucoup. Ce sont souvent des filiales d’entreprises publiques de travaux publics appartenant à ces mêmes municipalités. Il y a très peu de groupes étrangers présents en Chine et il est notablement difficile pour un promoteur de travailler en dehors de son bassin d’origine. De toute façon à l’exception des groupes hong-kongais récemment implantés qui sont autorisés à ouvrir des filiales en Chine continentale détenues à 100%, les entreprises étrangères doivent passer par des jeunes venture avec des promoteurs chinois.
L’immobilier en Chine reste aussi obscure que la pensée chinoise. On note une sur-offre dans l’immobilier du luxe mais un manque de logements sociaux très important (l’exode rural concerne tout de même 15 millions de personnes par an et il y aurait 100 millions de travailleurs temporaires, les mingongs, souvent sans logement). Pourtant les grands groupes chinois de Hong Kong continuent à investir le marché du luxe ! Comment comprendre aussi la hausse des prix d’achat dans les années 2002 à 2004 (quasiment un doublement des prix en l’espace de trois ans) et la baisse du prix des loyers sur la même période? Notons d’autre part qu’il n’y a quasiment pas de marché secondaire (comment fixer alors des prix réels sans marché de la revente). Enfin, l’impression générale est que les grands groupes préfèrent attendre que de brader leur actif, alors que les chinois s’endettent sur des 40aines d’années pour acquérir un bien durable.
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